Laure Andrillon
Photographe sélectionnée aux Nuits Photographiques de Pierrevert 2024
Laure Andrillon est une photographe française installée à San Francisco. Elle s’intéresse aux histoires de migrations ainsi qu’aux enjeux liés à la santé, le vieillissement, le changement climatique et la justice environnementale. Elle a étudié la philosophie contemporaine et la théorie des arts à l’Ecole Normale Supérieure et l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales de 2011 à 2015, avant d’obtenir un second master de journalisme au Centre de Formation des Journalistes à Paris, en 2016. Elle est également diplômée de l’International Center of Photography à New York, où elle a obtenu la bourse au mérite de la direction afin de suivre une formation en photographie documentaire en 2021 et 2022.
Son travail photographique a été exposé à l’International Center of Photography de New York (Etats-Unis), au festival Encontros da Imagem à Braga (Portugal) et lors du Festival pour la photographie éthique de Lodi (Italie), en 2022. Ses reportages écrits ont été reconnus par le prix des lecteurs Relay (meilleur article environnemental en 2021), la Société civile des auteurs multimédias (bourse Brouillon d’un rêve en 2020) et la Fondation Varenne (prix du meilleur article magazine en 2019). Elle est également lauréate du prix Cancer World Journalism Award (2018) remis par l’Ecole européenne d’Oncologie, et du prix AJIS de l’information sociale (2016).
Son travail est paru dans The Washington Post, Le Monde, Libération, Géo Magazine, L’Equipe Magazine, LensCulture, Usbek & Rica Magazine, Néon Magazine, etc.
Série présentée : « Fountain of Youth (Fontaine de jouvence) »
Les Honeys and Bears sont une équipe de natation synchronisée pour séniors fondée en 1979 à Harlem, New York. Ses membres Afro-Américains sont âgés de 62 à 101 ans. La plupart gardent un souvenir vivace de l’ère de la ségrégation des piscines aux Etats-Unis. Certains ont nagé toute leur vie ; d’autres commencent à peine leur apprentissage. Quand leurs corps se glissent dans l’eau, la gravité semble s’évaporer. Les maux et blessures se font oublier pour laisser place à une légèreté joyeuse et une jeunesse retrouvée.
Ce projet documente la manière dont la piscine est devenue un lieu de guérison physique et psychologique pour ces nageurs, après avoir été souvent une source de traumatisme, parfois passé de génération en génération. Certains se souviennent aller à la piscine lors des « colored days », les journées pour les « gens de couleur ». On leur racontait que les bassins seraient vidés après leur passage pour permettre aux Blancs de s’y baigner à nouveau. D’autres redoutaient d’apprendre à nager après avoir eu vent de rumeurs, comme celle qui laissait entendre que les corps noirs ne pouvaient pas flotter du fait de la composition différente de leurs os. Les fillettes se voyaient interdire de se mouiller la tête, car leurs mères consacraient beaucoup de temps et d’argent à défriser leurs chevelures dans l’espoir de les rendre plus semblables à celles des petites filles caucasiennes.
Ce travail photographique a pour objectif d’explorer ce passé de l’ère de la ségrégation des piscines tout en racontant l’histoire inspirante de séniors défiant ensemble jusque dans leur vieil âge les stéréotypes raciaux avec lesquels ils ont grandi presque toute leur vie. Les Honeys and Bears espèrent servir d’exemple pour les jeunes générations de leur communauté, encore défavorisée aujourd’hui parce qu’elle a un accès limité aux infrastructures et à l’enseignement de la natation. Jeff Wiltse, historien et auteur de « Contested Waters: A Social History of Swimming Pools in America », explique que la dé-ségrégation des piscines dans les années 1950 et 1960 a mené à un développement accru de piscines privées et à un manque d’investissement dans les piscines publiques qui se ressent encore aujourd’hui, en particulier dans les quartiers noirs et hispaniques.
Cet héritage est important à reconnaître aujourd’hui, car selon l’agence fédérale américaine de contrôle et prévention des maladies (CDC), les Afro-Américains âgés de 10 à 14 ans sont près de 8 fois plus susceptibles de se noyer en piscine que les adolescents blancs du même âge.
Quelques images de la série « Fountain of Youth (Fontaine de jouvence) »
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